Defrichement

Les défrichements et la mise en valeur des sols au cours des âges

Suite Jusqu'au XVIIIe siècle

 
 

Dans les siècles suivants, l'évolution démographique obligea les populations à poursuivre le « grignotage » de la couverture végétale originelle mais avec des objectifs beaucoup plus modestes. Là encore, la toponymie est assez révélatrice. C'est toute la série des noms à terminaison en « ière » ou en « erie » caractéristiques du bas moyen âge, les noms empruntés aux espèces végétales : « les bruyères » ou indiquant la persistance tardive de zones encore boisées ou en friche : « les Bois » , « La Gastine ». On remarquera que ces toponymes tardifs sont, à la périphérie des zones détrichées au cours des âges précédents ; ce sont de nouvelles conquêtes, sur la nature vierge.

Les grandes institutions religieuses du diocèse (les frères de la léproserie de Beaulieu près de Chartres, les Bénédictins de Coulomb et de l’abbaye St père de Chartres, le chapitre de la Cathédrale de Chartres, les Chevaliers hospitaliers de St Jean de Jérusalem de la Commanderie de La Villedieu en Druguesin, près de Laons) reçurent d’importantes donations foncières dans le territoire qui nous occupe .Elles contribuèrent sans doute beaucoup à l’élargissement du territoire cultivé, mais les documents en faisant mention sont très rares. On a dans le rapport d'un diffèrent qui s'éleva, en 1228, entre les religieux de la léproserie de Beaulieu, à Chartres et le curé de Brezolles, un témoignage indirect de l`évolution discrète du défrichement (archives départementales) : les frères de la léproserie de Beaulieu avaient, à Vaudry (paroisse de St Rémy) une maison et des terres dont une partie des revenus revenait à la cure de Brezolles proportionnellement aux superficies cultivées. Le curé de Brezolles réagit car les religieux ont fait défricher de nouvelles parcelles (des novales) sans penser pour autant à réajuster ses revenus selon les accords anciens.

 
 

Cassini 1

 
 

Au XVIIIe siècle, sous l'Ancien régime puis au siècle suivant les défrichements sont devenus contrôlés et la conservation des autorisations délivrées au fil des années, nous permet, de connaître en quels lieux et à quelles dates précises sont tombées les dernières landes de bruyères que la région gardait encore.

Ainsi, on défricha :  

- à Beauche de 1780 à 1789, 68 arpents de bruyères et bréaudages ; en 1785, au hameau des « Bruyères », toponyme bien significatif, 24 arpents (registres de l'élection de Verneuil)

- à Bérou, au hameau d'Autrebois, en 1785, 5 arpents de bruyères et à Boutry (à l'époque sur la paroisse de La Mulotière), en 1786, un quartier en friche et bréaudage.

- à Brezolles, au hameau du Petit Chêne, en 1785, 10 arpents de pâture, bruyère et bréaudage (egistre du gref de l'élection de Verneuil) puis, sur la ferme de Fontaine, 255 perches de pâture, bruyère et friche.

- à Dampierre-sur-Avre, au lieu-dit, Bois-Comteux en 1787. Par ailleurs, une décision ministérielle du 14 mars 1851 autorisa le défrichement des bois du Plessis, de la Tasse et de la Mare mais cette décision n'eut pas de suite ou ne fut que partiellement exécutée car ces bois existent toujours.

- à La Gadelière (paroisse réunie au XIXe siècle à celle de Rueil), en 1782, 20 arpents de mauvais bois et taillis (archives d'Eure-et-Loir) ; à la Tourillère, 8 arpents de bruyères et places vides faisant partie de 28 arpents de bois qui dépendaient du domaine de La Potinière. Par ailleurs, à Plévilliers, en 1782 également, on défricha 3,5 arpents de terre inculte.

- à Rueil, de 1774 à 1788, 58 arpents de terre en friche, landes, bruyères et bréaudage

- à St-Lubin-des-Joncherets, vers la fin du XVIIIe siècle, 11 arpents 61 perches de terre en friche, en bruyères, landes et pâtures ; au hameau de La Poterie en 1779, 3 arpents de terre en friche et bruyères.

- à St Rémy-sur-Avre, en 1785, trois quartiers de terre inculte près de la fontaine de Vaudry

 
 

Aux archives nationales un plan est conservé, dressé en 1767, (réf N / 1 / E et L/ 1) et ayant comme titre : « plan de la garenne et bruyères de St-Lubin-de-Cravant » appartenant à S. A. S. Monseigneur le Prince de Conti ». Il est relatif à la zone comprise entre la Meuvette, à l'ouest et au nord, la chapelle du Gué et la vallée Routard, à l'est, la route de Brezolles à Nonancourt, au sud. Sur ce document, il apparait que dans ce territoire couvert de bruyères de nombreuses parcelles ont été ouvertes par différents particuliers.

Au nord de la route de St-Lubin-de-Cravant à Nonancourt, dite « ancienne grande route de Paris tendant de St Lubin », on compte 25 parcelles d’une superficie globale de 5049 perches ; au sud de la même route, 21 autres parcelles représentent une superficie totale de 18668 perches (les noms des exploitants et les surfaces des parcelles sont donnés en annexe) ; ces parcelles de formes diverses ont été défrichées de manière très anarchique , certaines sont même encore isolées ; ces vastes étendues de bruyères étaient peuplées de lapins et pour les fixer on avait créé à proximité de la Mare aux Bœufs, mare qui existe toujours, des tertres artificiels afin qu'ils puissent y creuser leurs terriers. Au lieu-dit « La hutte » (carte I.G.N. 2015 ouest Nonancourt) se trouvait la maison du garennier qui gardait l'immense réserve. Il faut noter, au passage, que les lapins contribuèrent à maintenir la stabilité du biotope en empêchant l'implantation des espèces forestières.

Un commentaire (réf N II E et L 3) accompagne le plan. Il nous apprend que le commandeur de la Villedieu en Dreuguesin , et ses vassaux, habitants de Marigny ont droit d'usage et de pâturage, selon des accords anciens, dans les bruyères de St-Lubin et que les progrès du défrichement posent le problème du maintien de ces droits.

 
 

Carte 3

 

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