Durant 40 années, Régis DODIN, à bord d'un monoplan de l'aérodrome de Chartres, a sillonné le ciel au dessus et aux environs de la Nationale 154 entre Dreux et Chartres, afin de découvrir grâce à la prospection aérienne les traces d'occupation humaine qui bordent la voie romaine, axe sur lequel s'appuie la route actuelle. La SHADT possède ainsi un important fond photographique de diapositives (en partie numérisé) pour ce secteur au nord du département.
     Sur de nombreux clichés, on distingue, bien visibles, larges et rectilignes, les traces de la voie. Venant de Lillebonne, parfois parallèle souvent confondue avec la route moderne, elle a traversé Dreux et rejoint Chartres par Lèves.
     Les traces mises en évidence par la photo aérienne sont nombreuses autour de cet axe de circulation. Elles se succèdent sans interruption de Dreux à Chartres jalonnant à droite ou à gauche la voie romaine. Ce sont en grand nombre des fossés larges ou étroits, limitant des enclos à bestiaux ou structurant des parcellaires. Certains fossés parallèles signalent la présence de voies dont la datation est toujours hypothétique, elles ont, sans doute, été utilisées pendant une longue période. On peut aussi reconnaître des substructions de bâtiments qui pourraient être des granges, des habitations ou des villas dont l'importance reste à préciser. L'organisation de certaines traces pourrait être interprétée comme de grandes fermes agricoles ou des sanctuaires.
     Dans beaucoup de ces sites, il est émouvant de trouver en prospection au sol, là, des pièces de monnaies aux ef?gies impériales venant de Rome, là, des tessons de poteries simples ou décorées, locales ou venant de grands ateliers du sud-est et du centre de la Gaule (des tessons portent des marques de potier). On trouve aussi des valves d'huîtres ou encore des fragments d'amphores dans lesquelles l'huile d'oIive et le vin étaient acheminés produits dont nos ancêtres étaient friands et tout un matériel au travers duquel s'af?rme l'emprise de la civilisation latine sur le monde celte.
     Nul doute que la « vieille route » facilita les échanges commerciaux et vit passer de nombreux cavaliers, des courriers rapides et de lourds chariots ramenant des contrées lointaines leurs précieux chargements mais aussi des légionnaires, des commerçants et des troupeaux d'animaux domestiques.
     Nous n'avons aucun document nous permettant de dire quelle importance elle eut par la suite mais un fait est certain, son tracé fut conservé à quelques modifications prés pendant des siècles et des villages s'organisèrent sur son parcours ou à proximité au détriment des villas et des installations agricoles isolées : Blainville, Marville, le Boullay-Mivoie, Sérazereux, Le Péage...
     C'est une occupation du territoire par nos ancêtres que nos photos aériennes présentent dans ces pages.